samedi 20 mai 2017

La révolution pacifique de l'Etat (texte de mon interview du 13 mars sur France Info)


Si j’étais Présidente…  (interview du 13 mars 2017 sur France Info)

Je réorganiserais la gouvernance de l’Etat pour qu’il réponde aux besoins du XXIe siècle. Je crois en l’intérêt général qui n’est pas que la somme des intérêts particuliers et en l’autorité publique pour assurer une société durable en faisant respecter des règles du jeu. Mais cet Etat n’est pas omniprésent et n’intervient que selon des critères.

L’Etat démocratique moderne laisse créer la richesse par ceux qui savent le faire, les entreprises, les agriculteurs et les indépendants. Il intervient pour assurer le respect de la règle commune, pour défendre les intérêts de ses citoyens et de ses acteurs économiques dans la compétition internationale, pour assurer un environnement favorable au développement du pays et pour prendre en charge directement des fonctions régaliennes essentielles. Encore faut-il qu’il ait à sa disposition une administration dynamique.

Il ne faut pas céder aux sirènes démagogiques, mais en même temps, une révolution culturelle pacifique est nécessaire en France, au sein de l’administration et notamment de la haute administration. L’Etat ne peut plus fonctionner structurellement comme en 1950, avec des évolutions à la marge et toujours en réaction, dictées par l’urgence. Comment ? En changeant de culture et en menant parallèlement des transformations structurelles de l’administration.

1. Changer de culture de gouvernance

Nous devons abandonner en France notre approche systématiquement et uniquement quantitative et techniciste, qui consiste à croire mener une politique en augmentant ou en baissant les crédits, ou en fournissant des outils techniques. Tous les Etats qui réussissent y compris les plus libéraux se sont donné un socle d’intervention, dûment pensé sur la base de l’anticipation des défis à venir. Les Etats-Unis depuis longtemps, la Chine aujourd’hui de façon exceptionnelle et bien d’autres.

Dans le contexte international qui est le nôtre, l’Etat a besoin de doctrines d’intervention et de critères de décision. D’abord, qu’est ce qui est stratégique ? Quels sont les critères pour lesquels l’Etat devrait intervenir ? Il faut remettre en place au plus haut niveau de l’exécutif une boussole interministérielle qui fixe les grandes priorités des 20 ans à venir, qui évidemment s’adaptent en permanence. Il s’agit d’avoir une vision précise des défis internationaux, technologiques et autres, et une fine connaissance des rapports de forces et des intérêts internationaux et nationaux majeurs qui sont à la manœuvre. Aujourd’hui, l’Etat français est désarmé intellectuellement. Les politiques se décident au coup par coup, parfois sous influences.

Les rapports prolifèrent mais pas ce que j’appelle l’anticipation opérationnelle, l’organisation cohérente de l’action de l’Etat pour préparer le terrain. Par ailleurs, la France n’est pas seule au monde et doit savoir défendre et promouvoir ses intérêts en UE et à l’international, par une gestion intelligente de son influence et de ses réseaux. C’est ce qu’on appelle l’intelligence économique stratégique, qui est un mode de gouvernance qui va bien plus loin que la sécurité.

Par exemple, le numérique : comment créer de la valeur sur notre territoire à partir de l’exploitation des données, comment travaille-ton avec les autres pays démocratiques sur l’intelligence artificielle et le régime juridique des données, quelles évolutions du droit de propriété sont à prévoir, quels métiers précisément vont disparaître et quelles formations met-on en place, notamment dans la formation continue qui par parenthèse est un sujet essentiel et misérablement traité aujourd'hui, comment peut-on organiser la commande publique et les règles européennes pour répondre à ces priorités, etc. C’est au politique de décider mais sur la base d’une information éclairée et opérationnelle fournie par ses services, eux-mêmes en lien d’écoute et d’analyse des idées de tous les acteurs.

2. Transformer l'administration 

Comme beaucoup d’autres organisations non publiques, l’administration française regorge d’intelligence collective, aujourd’hui souvent bloquée par la démotivation, l’absence de circulation de l’information, la perte de sens.

J’ai vu comment des décisions se perdent dans la lourdeur des circuits, la volonté de certains de protéger des territoires et la détestable habitude de répondre à tout nouveau défi par toujours plus de textes. Même la volonté de simplification de la vie des entreprises a donné lieu à encore plus de normes. Ne pas prendre des mesures drastiques de réforme revient à donner des arguments à tous ceux qui veulent casser l’Etat.

Dans la haute administration, qui donne le la aux autres, il faut avoir le courage de mettre fin aux baronnies figées et aussi de prévoir des modes d’accès différents et plus ouverts. Mon devoir de réserve m’empêche d’aller plus loin sur ce sujet. Il faut redonner du pouvoir aux directeurs des administrations centrales qui doivent être responsables devant les ministres et réduire les rôles des cabinets aux tâches essentielles. Déresponsabiliser les gens en charge pousse à des fonctionnements de repli, et inversement.

La formation des écoles de préparation à l’administration doit s’ouvrir à la connaissance concrète des fonctionnements de l’économie, de l’UE et de l’international. 

Toute nouvelle politique publique doit prévoir de supprimer les parties des dispositifs et les procédures qu’elle modifie et qui ne sont plus cohérents avec les nouvelles priorités.

 

L'intérêt général rénové comme gouvernance d'un Etat moderne

L'intérêt général rénové est un concept de gouvernance redevenu pertinent. J'ai donné quelques pistes d'aggiornamento dans mon chapitre du livre collectif "Intérêt général et marché: la nouvelle donne" publié en mars 2017 chez Eyrolles dans le cadre du cercle Turgot. En voici un résumé.

  Un projet politique autant qu’économique

 La force de l’intérêt général est d’être un concept politique global, dont la cohérence se décline sur tous les plans. En ces temps où la glorification de la force pure peut nous ramener à des périodes très antérieures de l’histoire, il est bon de rappeler que l’essence de ce concept est de tenter de dépasser l’expression sauvage des instincts pour établir un mode de vie civilisé, sécurisé, utilisant le progrès au service de tous les hommes tout en permettant aux meilleurs talents d’être valorisés (à tous les sens du terme !).

La doctrine de l’intérêt général est adaptable et il convient aujourd’hui de la redéfinir sur la base des principes de liberté, individuelle et d’entreprise, équilibrés par la responsabilité, la solidarité et l’état de droit. Bien appliquée, elle contribue à éviter les affrontements entre groupes et communautés, en leur permettant d’échanger et de collaborer dans un cadre commun de références et de règles, légitimes car issues de l’élection et (en principe) simples et connues de tous. Elle trace un fil conducteur dans le traitement de sujets très différents, politiques, économique et sociaux.

L’intérêt général ne se réclame pas de la vertu, du bien ou de la morale, mots qui devraient inciter à la méfiance quand ils sont utilisés en politique. Il n’est ni une idéologie ni une règle morale, mais un principe et une règle du jeu, guidant l’état de droit dans la recherche concomitante de la justice et de l’efficacité, en économie comme dans d’autres champs de la société. C’est par exemple le fondement de la fameuse laïcité, liberté comme les autres assortie de droits et de devoirs, qu’il s’agit d’expliquer en tant que volet d’un projet plus large.

Ce contrat social renouvelé s’accorde particulièrement bien avec l’aspiration grandissante au partage, à la collaboration. et à la confiance. 

Une image ringardisée à restaurer

 Le concept rousseauiste d’un intérêt général issu d’un contrat social entre les citoyens et l’Etat a été entaché par certaines de ses applications. Dans la lignée de la Révolution française de 1789, des dirigeants totalitaires l’ont utilisé pour réduire les libertés et/ou faire régner la terreur. Loin de ces excès, la France du XXe siècle a construit un concept de droit public opérationnel.

La vérité oblige à dire que l’image de ce concept est aujourd’hui quelque peu « ringardisée », domestiquement et surtout internationalement, car il est associé à une gouvernance rigide, à l’inflation législative et réglementaire et à la multiplication des aides et des impôts. Il a trop souvent été capté par une classe, qu’on appellera la nomenklatura, agissant dans son propre intérêt pour maintenir ses rentes de situation et son pouvoir. On pourrait tout autant critiquer le libéralisme dévoyé, qui conduit aux mêmes résultats que l’excès d’Etat, à savoir la formation de monopoles, dans ce cas privés, qui tout comme ses confrères publics instaurent par tous moyens des situation de rente et dictent leur loi… mais on le dit moins parce que ces monopoles-là sont souvent issus du monde anglo-saxon dit libéral, dont la pensée est dominante dans les media et les relais d’opinion de la plupart des pays et des organisations internationales économiques depuis la fin de la deuxième guerre mondiale.

En même temps, l’irruption de crises comme celles de 1997 puis de 2008 a conduit des économistes libéraux influents, comme Joseph Stiglitz, Paul Krugman, Larry Summers, Olivier Blanchard, à reconnaître à des degrés divers l’insuffisance des mécanismes du marché pour assurer les équilibres économiques. Paul Krugman va jusqu’à se demander si l’opposition au modèle français ne tient pas de l’idéologie[1]. 

La nouvelle économie a besoin d’une nouvelle doctrine de l’intérêt général

Les technologies numériques ont créé des usages de partage et de collaboration. Elles permettent des formes d’échanges autonomes, une des plus caractéristiques étant les blockchains (ou chaînes de blocs), qui explosent les cadres d’exercice traditionnels de la finance, du commerce et du droit. Des transactions individuelles s’exercent indépendamment des intermédiaires actuels, assermentés ou non, et échappent au corpus de règles civiles et commerciales, même si quelques textes adhoc sont produits au coup par coup.   

A côté des nouveaux savoirs et produits rendus possibles par les usages « libres » se sont créées des puissances privées qui jouent habilement avec l’absence ou l’inadaptation des règles et avec une aspiration des individus à la liberté très bien canalisée, pour au final capturer seules la valeur et servir leurs intérêts propres, commerciaux mais aussi parfois idéologiques, sans autre légitimité que leur pouvoir financier et leur connaissance technique prédictive établie sur des milliards de données.

La gestion par l’intérêt général doit s’assurer que les nouveaux usages ne nuisent pas à terme à la création de valeur dans le pays et qu’ils ne vident pas l’action publique de toute capacité à mener des politiques volontaristes. Elle ne laisse pas le pouvoir politique aux algorithmes et à ceux qui les créent. Elle évalue le degré de transparence qui permettra un fonctionnement fluide et honnête du marché sans entraver la liberté de chacun et risquer de conduire à de nouveaux totalitarismes.

Dans ce contexte, la gouvernance par l’intérêt général bien compris devient paradoxalement le meilleur allié d’une économie de liberté durable, en établissant un cadre juridique commun et en demandant à tous les acteurs de le respecter. Ce cadre est fondé sur la concurrence réelle, qui sans règles n’a qu’un temps et sur la sécurité juridique, qui limite le laisser-faire quand il porte atteinte à la loyauté des échanges, d’autant plus s’ils sont collaboratifs et fondés sur la confiance.

L’intérêt général, art d’exécution

 Dans ce contexte, la notion de responsabilité, qui a émergé comme une clé de la gouvernance de l’entreprise, devient un apport très intéressant à la doctrine classique de l’intérêt général. Celle-ci s’accommode parfaitement de l’action d’acteurs privés et associatifs responsables qui expriment leurs intérêts et en même temps contribuent à la recherche du bien commun, à condition qu’ils respectent un cadre de comportement que seule peut mettre en place une autorité publique issue de l’élection, aujourd’hui l’Etat, pour l’instant source majeure de légitimité dans l’attente (hypothétique) d’une démocratie participative aux mécanismes sûrs. 

La gouvernance par l’intérêt général renouvelé est ainsi fondée sur un équilibre entre l’Etat, qui sous l’autorité de l’exécutif fixe les règles applicables et intervient selon des critères définis et connus, les parlementaires et les juges de la constitutionnalité, qui doivent le contrôler strictement et des acteurs privés et individus libres et responsables.

 La question du curseur est ensuite essentielle. Qui dit doctrine d’emploi dit critères, pour éviter au maximum la décision arbitraire ou instrumentalisée. Les critères de la régulation et de la potentielle intervention de l’autorité publique seront nécessairement stratégiques, c’est-à-dire liés au long terme et aux éléments vitaux de la collectivité, sécurité, non dépendance, actifs immatériels (éducation, recherche, santé) nécessaires à la production des richesses, niveau de la solidarité… pour l’affronter. A cette aune, nombre de normes, procédures et aides inutiles seraient supprimées en France au profit de l’affectation d’un impôt rendu moins lourd à des investissements durablement utiles à tous.

La subsidiarité est un autre critère, d’une part entre Etat et acteurs responsables, d’autre part entre outils. L’outil de fonctionnement naturel est le marché encadré par des règles souples, mais d’autres sont à utiliser quand celui-ci échoue, à l’instar du libéral Royaume Uni qui n’a pas hésité à nationaliser temporairement des banques.

La pertinence de l’action l’intérêt général nécessite que l’autorité publique qui l’exerce soit dotée d’une compétence professionnelle. En France, le fameux « Etat stratège » ne pourra exister que lorsqu’un gouvernement saura mettre en place un fonctionnement fondé sur l’analyse et l’anticipation du monde, l’échange d’informations, le benchmark, et mettre fin aux corporatismes administratifs qui bloquent les évolutions. D’autant qu’une nouvelle tâche d’intérêt général échoit aujourd’hui à l’Etat : défendre et promouvoir les intérêts de ses citoyens dans les relations entre Etats, au sein de l’UE et dans les instances mondiales. 

Le modèle de gouvernance par l’intérêt général a accompagné le développement exceptionnel de la France et d’autres pays européens depuis la fin de la deuxième guerre mondiale. Mais il s’est dénaturé au profit de visions parcellaires, cloisonnées et court termistes. Aujourd’hui, l’Union européenne prend ces questions très au sérieux. Elle pourrait redevenir le défenseur d’un intérêt général humaniste, seul à même d’éviter que des progrès techniques indéniables et des objectifs apparemment éthiques ne nuisent in fine aux libertés qu’ils prétendent défendre. La France doit pouvoir y trouver plus d’alliés sur ce sujet.

 



[1]Why, then, does France get such bad press? It’s hard to escape the suspicion that it’s political: France has a big government and a generous welfare state, which free-market ideology says should lead to economic disaster. So disaster is what gets reported, even if it’s not what the numbers say.” Paul Krugman, The Fall of France, The New York Times, 28 August, 2014

dimanche 8 mai 2016

Mise au point

Les informations fausses et malveillantes récemment publiées sur mon salaire à la Cour des comptes et sur le traitement privilégié dont j'aurais fait l'objet méritent une mise au point.

J'ai été nommée à la Cour des comptes non comme conseiller maître de plein titre mais comme conseiller maître en service extraordinaire, ce qui veut dire pour une période limitée (cinq ans), non intégrée dans les cadres de la Cour, mais mise à disposition par mon ministère avec un salaire de base d'administrateur civil hors classe de mon âge. Entre ce salaire et un versement complémentaire de la Cour, je gagne un peu plus de la moitié des 15000 euros par mois avancés par l'Obs, qu'on a vu mieux informé. 

La Cour n'est pas "une planque", on y travaille beaucoup, dans des conditions bien différentes de l'image rutilante véhiculée (un bureau pour 2, pas de secrétariat). Pour renforcer sa capacité d'analyse et de contrôle, elle s'entoure du maximum d'expertise interne. 

Quant au poste de délégué interministériel à l'intelligence économique, je l'avais accepté en renonçant à mes activités privées et à mon mandat d'administrateur indépendant. Mais c'est un poste discrétionnaire, ce qui signifie que le Président de la République et le Premier ministre, auquel j'étais rattachée, peuvent par la loi en disposer selon l'évolution de leurs choix stratégiques.

Au lieu de cataloguer les gens sur une école suivie à 25 ans, qu'il s'agisse de l'ENA ou de n'importe quelle autre, il serait plus sérieux de regarder leur cursus professionnel et, comme l'ont fait plusieurs journalistes après mon départ, de s'appuyer sur des sources crédibles et des faits vérifiés.    

Pour terminer, j'ai l'intention, dès que j'en aurai le temps, de reprendre ce blog sur des sujets de fond, notamment liés à la mise en œuvre de nos jours de la notion d'intérêt général. 

vendredi 28 août 2015

Mon départ de la Délégation interministérielle à l'intelligence économique (D2ie)

J'ai quitté à regret mes fonctions de Déléguée interministérielle à l'intelligence économique le 26 juin 2015, ayant été nommée le 25 juin Conseillère maître en service extraordinaire à la Cour des comptes. Servir cette institution est un honneur et j'ai l'intention de m'investir et de mettre mon expertise à disposition dans mon nouveau poste comme je l'ai fait dans les précédents. Pour information, "en service extraordinaire" signifie qu'on n'est pas intégré à la Cour mais mis à disposition par son ministère d'origine pour une période de 5 ans maximum. On n'a pas le statut de magistrat. On y travaille, très sérieusement, dans des bureaux de 2 personnes, sans secrétaire. Pas de problème pour moi, j'y ai été habituée pendant des années où j'ai été gérante de ma SARL. Mon prédécesseur Olivier Buquen a été nommé au Contrôle général économique et financier (CGEFI, dépendant de Bercy) après son départ. J'ai personnellement soutenu cette solution parfaitement convenable. Mon ante-prédécesseur Alain Juillet, lui, s'était retrouvé sans emploi quand il a été mis fin à sa mission, ce qui à mon sens était regrettable. Il a heureusement depuis suivi une carrière remarquable.

Pendant un peu plus de deux ans, la D2ie rattachée au Premier ministre a traité un grand nombre de cas concrets d'entreprises, a émis beaucoup d'alertes, d'analyses et de propositions et a lancé plusieurs grands chantiers de fond. Certains comme la réforme territoriale de l'IE, la production d'une doctrine opérationnelle tant attendue de l'intelligence économique (Références et notions clés), la production d'outils de référence,... ont abouti et d'autres très stratégiques étaient en cours quand je suis partie. Je ne peux évidemment en parler. Nous avons systématiquement cherché à décloisonner, à donner de la cohérence aux actions menées et avons, je crois, malgré de rares (mais actifs) blocages, insufflé de manière durable l'esprit d'un nouveau mode de gouvernance, fondé sur l'échange d'informations, entre acteurs publics et avec les entreprises, et sur la prise en compte systématique des enjeux internationaux. Nous avons traité de manière égale les quatre piliers de l'IE : veille/anticipation, sécurité économique, influence internationale et sensibilisation/formation. Cela n'aurait pas été possible sans la présence à mes côtés de Conseillers remarquables de compétence et de dévouement à l'intérêt général. Je souhaite que les résultats obtenus soient pérennisés et que les voies ouvertes se développent. J'adresse mes vœux de réussite à mon successeur car à ce poste, c'est de la compétitivité et de l'avenir de la France qu'il s'agit.

A ce poste stratégique, j'ai pu constater que nombre des observations que j'émettais dans mes livres, notamment dans "Nous et le reste du monde" (2007, nominé Prix Turgot 2008), consacré à la nécessité de changement de paradigmes des élites françaises, étaient toujours d'actualité. En même temps, il faut s'abstenir de toute démagogie, facile mais particulièrement dommageable en ces temps fragiles. La voie est étroite entre une indispensable révolution pacifique des esprits des dirigeants et la non moins indispensable obligation de conserver des repères essentiels et d'éviter le changement copié/collé ou par principe. C'est la voie que je me suis efforcée de tenir dans mon poste. J'ai peut-être une certaine inclination à mener cette action, étant administratrice civile d'origine, n'appartenant pas aux "grands corps" de l'Etat, ni à aucun parti, clan ou réseau, hors les nombreux réseaux de compétences et d'amitiés que je me suis constitué au fil des années en France et à l'étranger. Je suis ce qu'on appelle un produit de la méritocratie et des concours de la République, née bien loin de "l'establishment", que j'ai pu connaître par la suite, dans une famille très diverse par ses origines ainsi que politiquement et socialement. Je pense qu'il faut avant tout s'abstenir d'étiqueter les gens par catégorie ou par origine, quelle qu'elle soit. Estimer et juger selon ces critères est le début du racisme et du totalitarisme. Ainsi, ma promotion de l'ENA est connue (en France essentiellement...) pour avoir produit plus d'hommes et femmes politiques que d'autres, de droite et de gauche. J'aurais pu intégrer la promotion d'avant ou celles d'après, et j'aurais probablement suivi peu ou prou le même cursus, fondé sur mes compétences, mon travail et mes centres d'intérêt, comme bien d'autres. Peut-être de manière moins fréquente dans l'administration, je sais ce que c'est que d'aller chercher un contrat soi-même (grande satisfaction quand on y arrive), d'essayer de convaincre puis de satisfaire un client et de gérer une petite structure avec toutes les difficultés que cela implique. Je connais aussi l'absolue nécessité de connaissance précise de l'environnement et de dialogue multiculturel quand on travaille à l'international et qu'on veut également convaincre. Dans le privé, j'ai toujours consacré une partie de mon temps à travailler bénévolement pour l'intérêt général, comme Conseillère du commerce extérieur de la France puis en adressant personnellement depuis 2001 des notes à tous les pouvoirs en place, proposant des réformes indispensables de la gestion de l'Etat face à la mondialisation, que j'ai également déclinées dans mes livres, articles et conférences. J'ai essayé de les mettre en œuvre à la D2ie, le gouvernement en place en 2013 m'ayant donné la chance de m'y exercer.

J'ai plus que jamais l'intention de continuer à servir mon pays, qui se trouve confronté à des enjeux de développement et à des dangers tels qu'ils devraient unir tous les hommes et femmes de bonne volonté pour les traiter. Notamment, ce qu'on appelle "la guerre des idées" -qui fonde et précède toutes les autres- est vital et nous sommes en France et en Europe assez démunis de ce point de vue. Il s'agit non seulement de se donner une armature intellectuelle face à des dérives idéologiques mortifères en tous genres mais aussi les moyens d'intelligence économique et d'influence internationale de la mettre en œuvre. 

Site de Claude Revel
Twitter : @ ClaudeRevel





dimanche 2 juin 2013

Claude Revel nommée déléguée interministérielle à l'intelligence économique

Claude Revel a été nommée déléguée interministérielle à l’intelligence économique par le Conseil des ministres du 29 mai 2013.

Claude Revel was appointed Déléguée interministérielle à l’intelligence économique by  the French Council of Ministers on 29  May 2013.

Elle a mis fin à son entreprise, ses fonctions et ses mandats privés.
She dissolved her company and put an end to her private Directorships and positions.

"Je suis très honorée de la confiance qui m'est ainsi accordée et ferai le maximum dans mon domaine de compétences pour répondre de manière satisfaisante aux défis posés à notre pays et en particulier à notre économie, avec pour guide l'intérêt général.

Je ne pourrai plus m'exprimer de manière aussi personnelle que j'avais usage de le faire, par respect d'une réserve qui pour moi est un devoir légitime et important, et pour  des raisons évidentes liées à mes activités actuelles."

P.S au 4 janvier 2014 

Je peux néanmoins souhaiter à tous une excellente année 2014, dont il nous appartient collectivement de faire une grande année d'évolution pacifique et prospère dans le monde.



lundi 13 mai 2013

Entreprises françaises, investissez dans la pensée !

On ne le dira jamais assez, le fameux soft power américain, qui soutient le poids de la puissance économique et politique américaine, est aussi et surtout animé et financé par les entreprises et leur fondations, bref le secteur privé en général, qui en ont compris l'importance non tangible mais bien réelle. On connaît les célèbres fondations qui développent des projets internationaux (Soros avec Open Society, évidemment Rockefeller, Heritage, etc.) et aujourd’hui arrive un "petit nouveau" : Mark Zuckerberg qui selon le Wall Street Journal repris par le Monde chercherait lui à lever 50 millions de dollars de la part de pairs (comme le fondateur de Linkedin, Reid Hofffman) pour avec des "camarades de classe" Harvard développer un think tank /groupe de pression politique, diffusant des avis et conseils sur des sujets de société. M. Zuckerberg a déjà donné des dizaines de millions aux écoles de Newark et près de 500 millions de dollars à la Silicon Valley Community Foundation.
Avis aux entreprises françaises intéressées: nous avons des projets utiles, venez nous voir! Venez aussi nous voir à SKEMA Business School. C'est notre travail de produire de la pensée utile et opérationnelle, unissant les compétences des meilleurs experts dans de très nombreux domaines et régions du monde. 
Nos coordonnées sont sur le site IrisAction. Ou sur celui du Centre global Intelligence & Influence de  SKEMA.


Les nouvelles news


Si l'on y regarde bien, les nouvelles sont faites en majorité par des hommes et surtout, la parole est beaucoup donnée aux hommes dans les débats, les interviews, les chroniques. La raison trop souvent avancée :  "Il y a trop peu d’expertes femmes". [Comme : il y a trop peu de femmes suffisamment compétentes pour devenir administrateurs indépendants ou pour accéder à des postes de direction ou pour faire de la politique à haut niveau]. Et même : "Ce n'est pourtant pas faute d'essayer" !!!!!!!!!  (j'ai moi-même souvent entendu ce discours hypocrite).

On citera à ces malheureux en manque d’expertise féminine le Guide des Expertes publié en janvier 2013 par l'agence Epoke. Plus d'excuses -entre autres- pour les débats exclusivement masculins. 

C'est aussi pour lutter contre ces idées reçues et leurs conséquences en termes de contenu de l’information, que Les nouvelles news a été créé par une femme journaliste. Son côté parfois politiquement correct peut agacer mais la majorité des articles sont très intéressants et pointent des aspects de l'information oubliés ou soigneusement rélégués par les chers confrères. Il faut lire la revue de presse internationale du jeudi , où l'on apprend par exemple la mise en place de lois discriminatoires en Indonésie, le zèle -il me semble nouveau- de la police algérienne envers les conductrices femmes (remarquez, dans ce pays, elles ont le droit de conduire et de se plaindre et elles l'utilisent!), le débat sur le traitement des femmes écrivains américains par Wikipédia, les disparitions de filles dans plusieurs pays, mais aussi un concert de rock organisé à Kaboul pour des femmes à la ... barbe des intégristes et autres talibans, dans un lycée français d'ailleurs. Bravo la France !
On y apprend aussi ... l’obligation à l'Académie française d'appeler les académiciennes "cher confrère".... Ouh! les académiciens.